Parfois le bonheur est là, fugace, fragile, anodin et léger.
Ni plus ni moins léger que le poids d’une courgette et d’un économe.
Je tiens le vert et froid légume dans la paume de ma main, mes doigts refermés sur son corps n’ont pas une seule seconde vacillé. Ils n’ont pas fléchi, ils n’ont pas vrillé de la moindre petite
violacée tonalité.
Rien.
Aucun petit picotement ne les a balayés.
Pourtant le légume est froid. Il est gelé même. Mes phalanges plus fort l’enserrent. Faut-il avoir senti la mort gagner le bout de ses extrémités puis la vie y pulser et le cœur y palpiter pour savoir ce petit plaisir de rester simplement à température.
Eplucher ses légumes sortis du réfrigérateur.
Juste ne pas avoir à reposer le végétal pour qu’il se réchauffe, ne pas avoir à se presser les articulations pour les faire revenir à la vie, ne pas frissonner sous l’engourdissement, ne pas ressentir la brûlure. Juste éplucher ses légumes.
Je veux chaque petit instant goulument savourer comme le déshabillage de la pelure tendre de ce cucurbitacée. Merci…
PS. Il y a 6 ans que je n'avais pas passé une journée sans crise de Raynaud...