Extrait

Elles traversent un terrain vaste jonché de déchets, de détritus de toutes espèces et de vieilles carcasses rouillées, puis elles entrent dans un micmac de tôles et de bâches, empruntent un étroit chemin fait de restes de murs, d’enchevêtrements fébriles de briques et de ferrailles récupérées. Les habitants qu’elles croisent les accueillent avec le sourire. Il dépare avec les relents d’odeur pestilentielle qui règnent dans l’espace restreint dans lequel elles avancent. Elle n’ose parler, d’ailleurs, que pourrait-elle bien dire ? Qu'y-at-il à dire ?

 

***

 J’observe.

Au cœur de la misère, mon organe pulsatile se serre, voilà donc ce qu’est le vide, la misère. Le vrai vide et la véritable misère. Le mien sous ma poitrine se culpabilise alors d’exister. Ma bête en moi se soulève, se rebelle, montre ses crocs. Prise de sarcasmes, sauvagement elle ricane.

 

      - Sale petite gosse de riches, sais-tu ce qu’endurent ici les gens nés dans la grise et polluée poussière ? Tu fais moins la maline maintenant ? Elle dit quoi la boulimique ? Son mal être est dérisoire au milieu de cette merde, tu ne crois pas ?

 

 Je me perds dans des réflexions abracadabresques. Entre mon cerveau en surchauffe et la crasse qui pénètre dans mes narines, la nausée me prend. Je suffoque. Je me blâme de ressentir du dégoût et cela amplifie ma propre détestation. Face à la noirceur de la misère, mon vide existentiel grossit. Il enfle jusqu’à écarteler les ruelles tortueuses du bidonville.

 

Je cherche à le maintenir pour engloutir mon ego. Je voudrais la force de Nour qui avance avec certitude et foi devant elle. Comme si la douleur devait subir une cotation avant d’être mise sur le marché des malheurs et des blessures d’âme.

 

Enfin nous arrivons devant un petit baraquement. Nour frappe et rapidement une femme nous ouvre. Nour vient ici chaque jour prodiguer des soins. Comme Leïla, elle est médecin, alors elle donne de son temps auprès des plus démunis.

 

         - Eduquer, explique Nour. Il n’y a que cela pour sortir ce pays et ces gens de la tourmente, comme nous l'avons fait Leïla et moi grâce à Dieu, Louanges et grâce à lui. L’éducation est la clef de notre monde.